Chères adhérentes, chers adhérents et anciens adhérents, Je vous adresse à toutes et à tous mes salutations.
En cette période de confinement, propice à la réflexion, je me permets de garder le lien avec vous à travers quelques pensées au sujet de la pratique des arts martiaux traditionnels, tels que pratiqués au sein de l’Ecole Hoang Nam.
Ces réflexions ne sont que le point de vue du modeste pratiquant que je suis et n’ont absolument pas pour but de donner des leçons, je n’en n’ai pas les compétences.
Voyez ceci comme une simple réflexion cherchant à donner un sens à notre pratique.
En effet, dans une société qui permet à tout un chacun de se munir d’une arme à feu ou d’une arme blanche, une société où les agressions se font en bandes plus ou moins organisées, une société où porter un coup (même en état de défense) engage votre responsabilité pénale; quel est l’intérêt de pratiquer une discipline où l’on pratique des combats codifiés à mains nues?
Ne serait-il pas plus pragmatique de se mettre au tir ou, plus judicieux encore (et légal), apprendre à courir très vite?
Pourquoi pratiquer un art martial ou un sport de combat toute une vie, ou au moins quelques années, alors qu’il est probable (je vous le souhaite) que vous n’ayez jamais à faire face à un quelconque agresseur?
Après toutes ces questions on pourrait se dire: bon bah je jette ma licence et je me mets à la pétanque!
Je vous répondrais: SURTOUT PAS!!!
Ah? Et pourquoi alors?
Commençons par replacer l’usage des arts martiaux TRADITIONNELS dans leur contexte de départ. Je vous fais un condensé historique car sinon il faudrait que j’écrive un roman.
Ces Arts trouvent leurs origines dans des époques où les guerres étaient incessantes; pour un lopin de terre, pour le pouvoir, pour l’argent, pour imposer une religion, pour des ressources naturelles…
Les hommes (rarement les femmes, beaucoup plus Sages) ont commencés à utiliser les armes pour attaquer ou se défendre. Au fil des siècles et sur toutes les régions du globe, ceux-ci ont élaborés des méthodes de plus en plus sophistiquées, créant ce que nous appelons aujourd’hui les arts martiaux. Ces arts étaient étudiés pour le champ de bataille; ils ne se pratiquaient pas à main nues, l’adversaire était identifié et ils engageaient leur vie dans la bataille (ce qui n’a rien à voir avec une agression dans une ruelle aujourd’hui).
Pourquoi continuer à pratiquer ces vieilles techniques me direz-vous? Et sans armes? On ne croise plus beaucoup de personnes en armure et portant un glaive dans nos rues…
Patience, j’y viens.
Effectivement, les armes à feu ont fait leur apparition et les techniques militaires ont de ce fait forcément évoluées. Les hommes se sont vite rendu compte que l’épée était inefficace face aux fusils.
Les arts militaires se sont adaptés aux besoins du terrain et la configuration des batailles à changée- finies les batailles à 1000 contre 1000 en armure. Les épées mises au placard, les armes à feu n’ont toutefois pas empêchées les militaires de continuer à s’entrainer à mains nues et à développer des techniques utilisant des armes courtes comme le couteau, plus pratique pour le corps à corps dans les tranchées. De plus, l’expérience à prouvé que l’apprentissage des arts de combats sans armes permet aux militaires de développer un esprit combatif et de bons réflexes. Aujourd’hui, tous les militaires de terrain du monde pratiquent une boxe pieds/poings et de la lutte.
Ok! Mais pourquoi pratique-t-on des arts traditionnels alors? Vous-êtes vraiment pressez? On a le temps, on est confiné.
Bien que militaires, les arts martiaux se sont toujours transmis dans les sociétés civiles- tous les pays du monde ont leur boxe ou leur lutte. Concernant les arts martiaux d’extrême Orient, ceux-ci se transmettaient de génération en génération et restaient au sein de la famille, chacune d’elle gardant ses « secrets ». C’est pour cette raison qu’il existe des centaines de styles de kung fu différents.
Après l’arrivée des armes à feu, les maîtres d’arts martiaux ont continué à transmettre leur savoir
mais, pour rejoindre la question première de ce récit, il a fallut donner un sens nouveau à ceux-ci. Les arts martiaux sont petit à petit devenus des arts de vivre, intégrant des préceptes philosophiques et parfois même religieux (comme l’Aïkido par exemple). Le bouddhisme, le Taoïsme ou encore le Confucianisme ont fortement influencés les pratiques venant d’Asie.
Pratiquer le kung fu, le Tai Chi, le Taekwondo ou le Sanda est devenu un moyen de se construire, de préserver sa santé, voir même de s’instruire dans certaines écoles. Il n’est pas rare de voir des Maîtres enseigner à la fois l’art du combat, la Médecine Traditionnelle ou encore la calligraphie (donc l’écriture).
A travers une discipline physique et parfois rude, sont enseignées aux pratiquant.e.s des devises qui doivent les conduire à devenir des hommes et des femmes accomplis-tant pour la société que pour eux-même. « Un esprit sain dans un corps sain ».
Il peut être intéressant, en cette période de stagnation de l’activité humaine, de relire et de méditer les engagements sur l’honneur et les devises de l’école. Ne les récitons pas pour passer des ceintures de couleur, mais tentons d’en tirer la quintessence.
Quel sens donner à notre pratique? Chacun détient sa propre vérité.
Pour apprendre à se défendre? Pour faire du sport et avoir un physique d’athlète? Pour développer une activité sociale? Pour être en bonne santé? Pour apprendre un art ancestral? Pour apprendre à gérer son stress? Pour faire comme dans les films? Pour se dépasser? Pour gagner un pari?….
Quelle que soit la raison qui nous a poussée à entrer à l’Ecole Hoang Nam, c’est une raison valable pour se former aux arts martiaux.
Maintenant, si vous voulez progresser, je vous donne quelques tuyaux. Cela n’est que ma vision, très incomplète, d’une pratique utile:
-S’infliger une discipline du dépassement de soi (pas des autres), sans oublier d’être bon avec soi- même (y laisser sa santé n’est pas une solution).
-Répéter sans cesse les bases -Travailler la souplesse
-Développer une bonne condition physique; en cas de situation d’urgence le cerveau demande beaucoup d’oxygène et nos capacités de réflexions sont diminuées. Le travail cardio-respiratoire permet de limiter les effets de la torpeur.
-Eveiller une saine curiosité, comprenez que derrière la forme Traditionnelle que nous pratiquons il y a une réalité technique qui vous permettra de trouver l’efficacité en cas de situation de danger réel.
-Curiosité ne signifie pas indiscrétion et manque de politesse. Le Maître vous expliquera ce qu’il faut savoir au fur et à mesure de votre évolution au sein de votre pratique. D’où la nécessité d’intégrer de bonnes bases.
-Notre pratique s’inscrit dans la durée et demande de la Patience. On ne devient pas expert après un an de pratique.
-Relire et comprendre les devises et engagements sur l’honneur. Je sais je me répète.
J’en arrive à la fin de ce texte qui n’a pour but que la mise à profit de ce temps de confinement pour échanger quelques réflexions sur notre pratique commune. Je ne détiens aucune vérité sur ce qu’est une « bonne » pratique, mais si mon expérience martiale peut aider mes condisciples à progresser ne serait-ce que d’un petit pas sur leur Voie, alors je serais comblé et c’est avec humilité que je recevrais vos conseils en retour.
J’espère vous retrouver très prochainement sur les tatamis. Prenez bien soin de vos proches et de vous-même. Sportivement,
Le Président de l’Ecole Hoang Nam Jérémie REVEILLON